« … Le burg Hayn se trouvait au nord-ouest de la province Tigranakert. Il avait 4000 maisons dont mille étaient arméniennes et les autres étaient turques.
Les Arméniens étaient en générale grégoriens et protestants : 900 maisons grégoriennes, 100 maisons protestantes avec une seule église. Les grégoriens avaient trois collèges mixtes avec 600 élèves et les protestants en avaient deux, l’un était pour les garçons et l’autres pour les filles, en total 120 élèves.
Avec peu d’exception, l’artisanat et le commerce se trouvaient dans les mains des Arméniens. Je ne peux pas donner un compte direct économique mais je peux juste dire que les Arméniens étaient bien aisés.
Hayne réponda à la mobilisation à son tour. Tous les hommes arméniens avec peu d’exception sont allés faire leur service militaire, et en même temps le comité de la confiscation presque pillait les maisons et les commerçants arméniens. En plus, les militaires, qui étaient partout dans la ville, surtout dans les quartiers arméniens, volaient tout ce qu’ils avaient besoin sans compter les plaintes.
Je suis entré dans la 21ème compagnie d’artilleurs. Notre compagnie alla au village Hekipat près de Koprukoy. Après avoir passé deux mois là-bas, nous allâmes à Keotak. Ensuite, après les attaques turques, notre compagnie participa aux batailles de Soghanlou. Notre compagnie était composée de 1600 personnes, mais après les batailles nous fûmes restés 200. Tous ceux qui étaient vivants furent retirés au village Azap, nous y fûmes restés jusqu’au janvier pour nous reposer. Pendant ce mois les soldats arméniens furent désarmés. Dans notre compagnie il y avait 60 soldats arméniens. Nous tous nous fûmes aussi désarmés et envoyés au service. Après avoir servi 15 jours, on nous emmena à Erzeroum où nous fûmes arrêtés. Nous fûmes restés arrêtés 8 jours, ensuite, on nous emmena à Achgala.
Après avoir retiré les Arméniens de la compagnie, ils gardèrent seulement un soldat au nom Sedrak, parce qu’ils apprirent que celui-ci avait beaucoup d’argent et ils exigèrent pour qu’il livrait tous l’argent, mais ils reçurent le refusé. Ensuite, nous apprîmes des soldats turcs blessés qu’il fut tué.
Après avoir passé une nuit à Achgala, on nous emmena à Mamakhatoun pour nous faire toujours travailler sur les chemins.
Avant nous retiré de l’armée, on nous proposa de nous convertir. Nous exigeâmes de donner une raison pour cette demande. Ils répondirent qu’il n’y avait aucun raison, ils nous proposaient tout simplement de nous convertir. Nous refusâmes bien sûr et nous fûmes désarmés.
Nous travaillâmes sur les chemins de Derjan jusqu’au mois de mai. Ces jours-là les persécutions des Arméniens furent commencées. Tout d’abord ils arrêtèrent les personnes individus et pillèrent ostensiblement. Les violences et les confiscations étaient banales.
Les arrêtés noués furent sortis de la prison et furent emmenés là où nous étions. On nous avait déjà obligés de construire des tranchés où on devait enterrer leurs corps. Les Turcs tuaient tout le monde sous nos yeux et ils nous imposaient de les enterrer par nos propres mains en nous menaçant avec les armes. Les bourreaux étaient les gendarmes et les tchétés recrutés d’avance. Ils nous obligeaient de nous taire sous la menace de la mort et si on nous posait des questions nous devions répondre que les Turcs avaient attaqué et tué. C’était notre travail quotidien d’ouvrir des fosses et enterrer les cadavres.
Un dimanche les Turcs emmenèrent les emprisonnés d’Erzeroum près des fosses que nous avions ouvert. Ils y commencèrent à tuer. Après avoir les enterré, un des emprisonnés, blessé de poitrine, étaient encore vivant et demanda de l’eau. Un officier allemand, le pistolet à la main dit : « Si tu veux je te donnerai une balle à la place de l’eau », mais il ne tira pas, il ordonna de l’enterrer vivant avec les cadavres. L’autre jeudi on était sur le chemin avec le métrologiste. Un Arménien blessé, la tête bandée, vint nous demander du pain. Nous demandâmes d’où était-il et il répondit « on m’a enterré et moi je suis sorti après avoir souffert trois jours dans le cimetière ». Il était du groupe que nous avions enterré. Nous lui donnâmes du pain. Ensuite, il alla vers les camps des soldats de travail. Nous revînmes aux camps. Le même blessé était assis là. Les soldats crevaient les fosses. Nous voulions savoir pour qui était la fosse, parce qu’il n’y avait pas d’autre groupe. Le blessé répondit : « C’est pour moi, on doit m’enterrer moi ». Et vraiment on le jeta dans la fosse tout vivant et l’enterra ».
Après ces évènements, la déportation commença de la province de Karin et de Derjan. À ce moment-là, on nous proposa d’aller en exil avec nos familles si nous en avions dans ces provinces-là. Mais nous, en sachant qu’ils vont tuer, nous n’avons pas permis pour que les soldats de Derjan aillent avec les familles. Bien que les Turcs tirent leurs biens, les Arméniens de Derjan voulaient aussi aller avec les familles. Hasan Tchavouch, surveillant turc des soldats du bataillon de travail, ordonna sévèrement de ne pas y aller car on les tuait tous un peu loin. Personne n’a répondu.
Nous étions entre Keotriv-Koprei et Mamakhatoum. Les convois des déportés venaient tous les jours. On y séparait les hommes des femmes. Les Turcs tuaient les hommes puis fouillaient les femmes pour trouver de l’argent, ensuite ils les violaient comme les animaux et tuaient. Tous ceux qui restaient vivants furent déportés et nous étions obligés de jeter les cadavres dans les fosses creusés d’avance jusqu’à l’arrivée du deuxième convoi. Nous devînmes témoin oculaires des amusements sauvages. Les Turcs ouvraient les ventres des femmes enceintes et sortaient les enfants avec les poignards. Ils riaient et montraient à leurs amis la palpitation des nouveau-nés.
Il y avait six compagnes des soldats arméniens du bataillon de travail au long du chemin. Une nuit, on nous ressembla et ordonna d’aller vers Erzenka. Les militaires de haut rang devaient venir en automobile et il fallait aplatir les chemins. Cependant, avant l’arrivée à Koprie-Keuy, on ordonna de revenir. Ils dirent qu’ils voulaient nous emmener tuer parce qu’ils avaient reçu un ordre, mais ensuite, ils furent ordonné de ne pas tuer.
Un soir, Hasan tchaouch, dont j’ai déjà parlé, nous dit « ils vont vous tuer un jour, sauvez-vous ». Un groupe s’est préparé de s’enfuir. Sirakan tchaouch de Basen partit, ensuite il informa qu’il fut arrêté, emprisonné. Il sortit après trois jours et commença à travailler.
La nuit, Hasan pacha revint de nouveau et nous dit « après le travail, on doit vous tuer, sauvez-vous si vous pouvez ». Nous étions sept amis et nous décidâmes de nous sauver. Nous donnâmes du blé aux réfugiés et nous prîmes du pain et montâmes la montagne Djipidjé. Nous y rencontrâmes deux fugueurs turcs. Ils nous rejoignirent et ils nous accompagnâmes à Erzenka. Nous achetâmes du pain et partîmes.
Le matin, nous sortîmes et nous rencontrâmes les soldats turcs dans le rocher. Nous dîmes que nous étions des soldats de transmission. Dans les rocher nous perdîmes nos cinq amis et nous restâmes deux. Il y avait des camps militaires à proximité. La nuit nous allâmes chercher nos cinq amis. Nous crions leurs noms en espérant les trouver. Nous continuâmes les recherches trois nuits mais en vain. Les militaires des camps croyaient que nous étions des fédains et voulaient nous attraper mais perdirent nos vestiges. Celui qui était avec moi était désespéré. Il alla à d’Erzenka pour se rendre. Moi, je suis allé à Dersim.
Le 1 mars 1916 les Kurdes attaquèrent les Turcs à Khozat, à Tersim, à Metskert et toutes les régions de proximité. Je participai à ces attaques quatre fois. Après nos attaques, les Kurdes ne me donnaient pas ma part de nos brigandages que nous apportions. Je restais presque nu. C’est pourquoi j’allai chez un autre maitre kurde où il y avait beaucoup d’Arméniens. Nous y restâmes jusqu’à la prise d’Erzenka, ensuite nous allâmes à Erzenka ».
ՀԱԱ, ֆ. 227, ց. 1, գ. 492, թթ. 2-8, բնագիր, ձեռագիր:
Հայոց ցեղասպանությունը Օսմանյան Թուրքիայում. Վերապրածների վկայություններ, փաստաթղթերի ժողովածու, հ. 3, Էրզրումի, Խարբերդի, Դիարբեքիրի, Սեբաստիայի, Տրապիզոնի նահանգներ, Պարսկահայք, ՀԱԱ, Երևան, 2012, էջ 81– 84: